dimanche 4 juin 2017

Slowdive - Slomo "live" (2017)

And now for something completely vieux con.
Dans les années 70, c'était facile d'avoir l'impression de tout savoir de la pop, du rock et de la folk; il suffisait de lire attentivement Rock & Folk, de regarder Chorus sur Antenne 2, et d'écouter France Inter le soir, et on avait à peu près fait le tour. On écoutait, on comprenait les courants, on observait les mouvances, on achetait. Ce qu'on n'achetait pas, on l'entendait chez les copains, si ça nous plaisait on enregistrait une cassette sur un affreux combiné tourne-disque/k7. Ca ne méritait pas le nom de piratage, vu la piètre qualité de copie analogique, malgré l'apparition du dolby puis des cassettes au chrome. Ce qui était pirate, c'était les concerts enregistrés sous la pluie à travers un sac de couchage, fallait vraiment être fan pour acheter. 
Le disque était un objet concret et imposant, quand on l'achetait on nouait avec lui des rapports quasi-amoureux, on l'emmenait avec nous aux soirées, on notait et mémorisait les craquements et poussières qui apparaissaient au fur et à mesure de l'usure provoquée par les écoutes. Ca prenait des mois pour tisser son cocon de glu émotionnelle autour de lui.
Bon, voilà qu'en 40 ans, le disque a quasiment disparu comme support, tout s'écoute gratuitement et s'achète en ligne, et il ne s'écoule pas une semaine sans que 30 groupes essentiels surgissent de nulle part. Qu'on le veuille ou non, on est largué. Ca fait longtemps qu'on n'a plus le coeur à lire Rock & Folk, les Inrocks sont trop souvent dans la hype, et on est passé à Télérama et aux milliards de blogs musicaux qu'on déchiffre d'un oeil morne, et qui rendent compte de l'émiettement, de la fragmentation des musiques et des publics. On est obligé d'en rabattre sur notre présomption d'universalité. Et de quoi était-elle le paravent ? Une croyance absurde qu'on allait séduire des gonzesses par notre connaissance encyclopédique des arcanes du rock ?
Autant vous le dire tout de suite, avant d'en entendre parler dans Télérama, je croyais que le shoegaze c'était quand on regarde ses chaussures quand on a trop fumé de pétards. J'ai pas connu Slowdive... 17 ans qu'ils n'avaient pas sorti un album. Qu'est-ce qu'ils ont fait pendant tout ce temps ? ils étaient avec Kyle MacLachlan dans la Red Room de Twin Peaks, en attendant que David Lynch y rallume la lumière ? Si j'étais lui, j'aurais mis du Slowdive dans la B.O. de la saison 3, plutôt que les obscurs groupes de synth-pop 80's qu'il balance à chaque fin d'épisode. Les fantômes gazeux des Psychedelic Furs ou des Cocteau Twins que j'entends sur le dernier Slowdive valent bien les girlbands qui défilent dans ce nouveau Twin Peaks. Mais bon, je ne suis pas David Lynch, il m'arrive parfois d'avoir l'impression de revivre éveillé certaines séquences cauchemardesques de la série, c'est déjà pas mal, ne soyons pas trop gourmand.

Ah j'ai eu du mal à me retenir de vous proposer le dernier Slowdive piraté, l'album n'est pas complet sur bandcamp ni sur soundcloud ni sur youtube. Sur spotify ou deezer, sans doute, mais je ne fréquente pas ces plate-formes. Voici les deux premiers morceaux de l'album, qui me plaisent bien.



15 commentaires:

  1. Et il faut se lever de bonne heure pour trouver une chronique intéressante sur Télémérou puisqu’ils semblent convaincus qu’il ne faut parler que de musiciens qui parlent à leurs lecteurs - âgés, les pauvres.

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  2. Ne me provoque pas. Je ne voulais pas en rajouter dans la grinche. Ma chronique sent déjà assez l'hospice et le désinfectant comme ça. Heureusement qu'écouter le dernier Slowdive rend éternellement jeune, grâce à Télérama. A partir du moment où on accepte son âge, plus de problème pour rajeunir.

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  3. On a arrêté l'abonnement à Teleramoche... leur tentative de rajeunir leur lectorat nous a fait fuir. Les articles étaient devenus tellement courts qu'on le lisait en 5 minutes. Ma téloche est parti à la déchèterie hier. Les temps changent.

    Le slowdive mouaif... J'en avais un album et certainement une black session sur une cassette mais je n'ai jamais été hyper fan je préférais ride ou blur (des débuts).

    Et maintenant?
    https://www.youtube.com/watch?v=PWVF6XGhq6E

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  4. Oui, c'est une idée. Quand les nouveautés musicales ne procurent plus le frisson et l'ouverture d'autrefois, il faut peut-être se tourner vers les voies méditatives sans support.
    Il y a une vieille bd de Wolinski comme ça, il se révolte contre tout le contenu de son appartement, les fringues fabriquées en Chine, les meubles objets d'aliénation, il bazarde tout par la fenêtre, et dans la dernière case il est en zazen, à poil au milieu de son appartement, et il se dit "j'aurais peut-être dû attendre un peu avant de jeter la télé".

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  5. S’il a gardé l’ordi, ça va.

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  6. Je ne voudrais pas te lancer un picq, Li-An, mais peut-être devrais-tu lire "Qui va prendre le pouvoir ? Les grands singes, les hommes politiques ou les robots"

    Combien de temps tiendrais-tu sans ordi?

    Nous ne sommes pas à l'abri du syndrome planète des singes.

    "https://www.franceculture.fr/emissions/lidee-culture/pascal-picq-risque-un-syndrome-de-la-planete-des-singes

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  7. Quand je pars en vacances, je n’emporte aucun ordi (et je n’ai pas de smartphone) et je m’en porte très bien.
    Quant au pouvoir, je vais d’abord demander à ma femme.

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  8. Lol. Pas mieux. La mienne ignore que j'ai un blog, je lui fais croire que je regarde du porno, c'est plus prudent. Un tas de futurs nous pendent au nez, celui décrit par Boulle et Picq est un lointain écho de "la machine à explorer le temps" de Wells. Les dystopies totalitaires se rapprochent plus vite que la SF ne peut les prédire.

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    1. Ce qui est bien avec les prédictions, c’est que tant qu’elles ne sont pas réalisées, on peut en parler avec beaucoup de sérieux et d’assurance à la radio. Vu comme le magnétoscope, Internet, le smartphone et Macron ont été imprévus (je me rappelle que dans ma jeunesse, on m’annonçait la fin du pétrole dans les années 80 d’où Mad Max). Je ne crois plus qu’à une seule prédiction : un jour le soleil va s’éteindre et même les vegans n’y pourront rien.

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    2. Je m'insurge : beaucoup de prédictions faites en 1900 se sont révélées justes 100 ans plus tard

      http://www.lefigaro.fr/sciences/2012/01/13/01008-20120113ARTFIG00526-ces-predictions-de-1900-qui-se-sont-revelees-exactes.php

      Dire : "on a rien vu venir..." me semble assez faux.

      Suffit de lire Aldous

      Je ne pense pas que l'avenir soit imprédictible. Il est imprédictible avec certitude comme le passé d'ailleurs.

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  9. Hélas certaines prédictions se vérifient déjà :

    "Des absences ­totales de langage à 4 ans, des troubles attentionnels prégnants : l’enfant ne réagit pas quand on l’appelle, n’est pas capable d’orienter son regard vers l’adulte ni de maintenir son regard orienté vers l’objet qu’on lui tend hormis le portable."

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2017/05/31/la-surexposition-des-jeunes-enfants-aux-ecrans-est-un-enjeu-majeur-de-sante-publique_5136297_1650684.html#eoKRWKHTcfxBiaq7.99

    Et pis t'as vu wars.

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  10. Bon mon fiston montrait le mm genre de problème il y a 20 ans avec 1 heure max de télé par jour et pas de portable. Il devait être rudement en avance sur son époque.

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  11. Le mien ne donne plus aucun signe de vie depuis que je lui paye son appartement, et il n'a même pas encore vu la saison 3 de Twin Peaks.

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  12. Sûr que la saison 3 de Twin Peaks n'aide pas à trouver un sens à tout ça, mais ce n'est pas vraiment ce qu'on lui demande.
    J'ai rien contre Chromatics ou les autres groupes employés par Lynch pour clore les épisodes, mais c'est sûr que Slowdive les surclasserait largement.
    Slomo est un classique instantané, sans doute le plus beau morceau de ce cru 2017 jusqu'à présent.
    S'agissant des futurs dystopiques, je suis trop allègre pour avoir envie d'y penser outre mesure en ce moment.

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  13. Yep. Slomo, en buvant de l'éther, ça descend comme le petit Jésus en culottes de velours. Mais ça rappelle étrangement des sons qu'on croyait disparus. Aussi intemporel que Twin Peaks.

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